Maladie (professionnelle ou non), accident du travail : le salarié acquiert désormais des congés payés
Dans cinq arrêts en date du 13 septembre dernier, en vue de se conformer au droit européen, la Cour de Cassation opère un revirement de jurisprudence inédit en matière de congés payés et précise les règles de prescription.
Elle écarte le droit français relatif à l’incidence sur les congés payés de la suspension du contrat pour cause de maladie ou pour cause de maladie professionnelle ou accident du travail au-delà d’un an.
Droit français à ajuster en matière de congés payés
En droit français, le salarié n’acquiert pas de congés payés, pour la période pendant laquelle il est en arrêt de travail, pour cause non professionnelle, sauf usage ou disposition conventionnelle (C. trav. L. 3141-3).
En revanche, les périodes de suspension du contrat de travail en raison d’un accident de travail ou d’une maladie professionnelle sont assimilées à du travail effectif pour la détermination de la durée du congé, mais uniquement dans la « limite d’une durée ininterrompue d’un an » (C. trav., art. L. 3141-5, 5°). Autrement dit, le salarié arrêté n’acquiert pas de congés payés au-delà d’un an.
Or, la directive européenne (dir.2003/88/CE du 4 novembre 2003 art.7) prévoit que le salarié dispose d’un droit à congés payés, d’au moins 4 semaines, peu importe le motif d’absence. La jurisprudence de la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE) précise que cette directive n’opère aucune distinction entre les travailleurs qui sont absents pour cause de maladie, et ceux qui ont travaillé au cours de cette période, sur leurs droits d’acquisition à congés payés.
Ainsi, après avoir rappelé l’article 31 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union Européenne, l’article 7 de la directive, ainsi que les arrêts rendus par la CJUE, la Cour de cassation en déduit que le Code du travail n’est pas conforme à la directive (Cass.soc. 13 mars 2023, n°11-22285).
À noter : La directive européenne n’a pas d’effet direct dans un litige entre un salarié et un employeur de droit privé. Le salarié ne peut donc pas se prévaloir de l’application de cette directive, dans un litige l’opposant à son employeur.
Un revirement de jurisprudence historique : le droit français écarté
Dans les trois premiers arrêts, la Cour de cassation indique que les dispositions de l’article L.3241-3 du Code du travail qui subordonnent le droit à congé payé à l’exécution d’un travail effectif, ne permettent pas une interprétation conforme du droit de l’Union (Cass.soc.13 septembre 2023, n°22-17340 FPBR ; Cass. soc., 13 sept. 2023, n° 22-17.341 ; Cass. soc., 13 sept. 2023, n°22-17.342). En conséquence, ce salarié peut prétendre à ses droits à congés payés au titre de cette période.
Dans un quatrième arrêt, un salarié victime d’un accident du travail, réclamait ses droits à congés payés correspondant à l’intégralité de son arrêt d’une durée supérieure à un an. Or, l’article L.3141-5 du code du travail prévoit l’assimilation de la durée d’un accident du travail pour l’acquisition du droit à congés payés, jusqu’à un an.
La Cour ne retient pas ce plafond et juge que ce salarié peut prétendre à ses droits à congés payés au titre de l’intégralité de la période (Cass.soc. 13 septembre 2023, n°22-17638 FPBR).
Remarque : Dans la notice relative aux deux arrêts précités, la Cour de cassation précise que la prise en compte des arrêts maladie et de l’intégralité des arrêts AT/MP pour l’acquisition des congés payés vaut en l’état non seulement pour les quatre semaines de congé principal, mais aussi pour la 5e semaine et les éventuels congés payés conventionnels qui viennent s’ajouter.
Dans un cinquième arrêt, la Cour de cassation précise que la prescription ne peut courir qu’à compter de la fin de la période au cours de laquelle les congés auraient pu être pris, que si l’employeur justifie avoir accompli les diligences, afin d’assurer au salarié la possibilité d’exercer son droit à congés payés (Cass.soc. 13 septembre 2023, n°22-11106).
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